A moins de deux semaines des élections britanniques, HSBC a indiqué vendredi envisager un déménagement hors du Royaume-Uni. Ses dirigeants n’ont pas échappé à l’ire d’actionnaires excédés par le scandale « SwissLeaks »

En pleine campagne électorale britannique, l’annonce a ému les décideurs politiques outre-Manche. « Dans le cadre d’une revue stratégique plus large, le conseil d’administration a demandé à la direction de commencer à travailler pour savoir quel est le meilleur endroit pour le siège de HSBC dans ce nouvel environnement », a déclaré vendredi le président Douglas Flint lors de l’assemblée générale des actionnaires. « La question est complexe et il est trop tôt pour dire combien de temps cela prendra ou quelle sera la conclusion mais le travail est en cours », a-t-il ajouté. La première banque européenne a son siège à Londres mais possède aussi d’importantes activités à Hong Kong, d’où elle est originaire.

Pression des investisseurs

La « Hongkong and Shanghai Banking Corporation » y avait en effet été fondée en 1865 par l’Écossais Thomas Sutherland. L’établissement avait déménagé son siège à Londres en 1993, quatre ans avant la rétrocession de Hong Kong à la Chine. Depuis, le déménagement de HSBC a fait l’objet de maintes rumeurs mais c’est la première fois qu’un dirigeant du groupe en parle officiellement. Il faut dire que le gouvernement du Premier ministre conservateur David Cameron a régulièrement augmenté les taxes sur les banques pour renflouer les caisses de l’Etat. HSBC s’est vu prélever 750 millions de livres (1,05 millions d’euros) en 2014 et les principaux partis politiques qui font campagne actuellement prévoient de maintenir ou d’alourdir encore ces taxes.

Le Royaume-Uni a en outre pris des mesures pour encadrer plus strictement le secteur bancaire. Les banques vont notamment être contraintes de séparer leurs activités de banque de détail et d’investissement. Au regard de la part de ses bénéfices réalisés en Europe, qui comptent pour moins d’un quart du total pour HSBC, cela peut paraître beaucoup. Les investisseurs font donc pression sur le groupe bancaire pour quitter la Grande-Bretagne. L’annonce de Douglas Flint a d’ailleurs entraîné une hausse du cours de la banque de plus de 3,5 % dans l’après-midi.

Un coup dur pour David Cameron

Dans la foulée de l’annonce de HSBC, David Cameron a souligné que les interrogations du groupes confortaient l’importance pour la Grande-Bretagne de maintenir un cadre favorable aux entreprises. « C’est un rappel important de ce qu’il est vital pour nous de maintenir une politique favorable aux entreprises et à l’emploi dans notre pays », a-t-il déclaré. Les projets du groupe bancaire n’en sont pas moins un coup dur pour le Premier ministre qui, à deux semaines des élections, tente de défendre l’idée que le parti conservateur est le plus à même de piloter le redressement économique du pays.. HSBC a aussi prévenu que la tenue d’un référendum constituait la plus grosse incertitude pour le développement économique du pays. Or David Cameron s’est engagé à organiser ce référendum en 2017 s’il est réélu.

HSBC n’est pas la seule banque britannique qui pourrait être tentée par un déménagement. Standard Chartered est également sous la pression d’actionnaires pour partir à Hong Kong ou Singapour. « Bien que nous n’ayons pas de plans actuellement pour changer notre domiciliation, nous écoutons très attentivement nos actionnaires sur ce sujet », a indiqué un porte-parole de la banque à l’AFP.

Swissleaks  : les dirigeants sur le grill

Le projet de déménagement n’a pas pour autant occulté les révélations en février du « Swissleaks ». La direction de HSBC s’est retrouvée une fois de plus sur le grill vendredi, cette fois face à ses actionnaires à qui elle a promis de tout faire pour éviter de nouveaux scandales. En préambule, le directeur général Stuart Gulliver a tenté de convaincre que, depuis son arrivée et celle du président Douglas Flint en 2011, HSBC a été « complètement transformée » pour mettre un terme « aux pratiques inacceptables du passé ».

Ces assurances de bonne conduite n’ont toutefois pas suffi à calmer l’ardeur d’un certains nombre d’actionnaires qui fulminaient. L’un d’eux a accusé HSBC de se conduire comme une véritable « organisation criminelle » et sa direction de fermer les yeux, de mentir et de « traîner la banque dans la boue comme jamais au cours de son histoire de 150 ans ». Dans ce contexte, la rémunération annuelle de M. Gulliver, 7,6 millions de livres en 2014 (10,6 millions d’euros), et de ses deux principaux adjoints, plus de 4 millions de livres chacun, suscite la grogne. « La paie de ces trois messieurs a-t-elle été évaluée au regard des conséquences de leur politique pour la réputation du groupe ? », a demandé l’actionnaire Tony Williams. La majorité a voté in fine en faveur de la politique de rémunération des dirigeants, mais près d’un quart d’entre eux s’est prononcée contre.