Anshu Jain, co-président de la première banque allemande, s’inquiète d’un assèchement du capital en France.
Il y voit l’Hexagone face à un long chemin pour retrouver un niveau adéquat d’investissement capable de soutenir la croissance.
Le co-président de Deutsche Bank, Anshu Jain, s’inquiète de l’assèchement du capital en France et encourage implicitement Paris à créer un cadre propice à la relance de l’investissement. «La fuite de capitaux [en France] ne saurait se poursuivre sur une trop longue période», a déclaré le banquier indo-britannique ce mercredi à Francfort, lors de la conférence bancaire organisée par le quotidien des affaires «Handelsblatt».
Interrogé par le directeur de la publication sur ce qu’il ferait à la place du Premier ministre français pour soutenir la croissance du pays, il a répondu : «J’essaierais de comprendre pourquoi non seulement les capitaux au plan international mais aussi domestique ont du mal à être investis dans l’ampleur qui serait souhaitable, et j’essaierais de créer un environnement pour que l’emploi de capital reparte de l’avant.» Et d’ajouter : «Le chemin est encore long en France pour y parvenir.»
43% des grandes sociétés françaises détenues par des étrangers
Les déclarations d’Anshu Jain interviennent à un moment où, à Paris, le gouvernement «Valls II» affiche sa détermination à redresser le pays. Le constat du banquier sur le supposé assèchement des capitaux en France parait toutefois contredit en partie par les faits. Une récente radiographie de l’actionnariat en France montre en effet que les étrangers montent en flèche dans le capital des grandes sociétés cotées en France, pendant que les particuliers et l’Etat fuient la Bourse. Les valeurs françaises sont désormais détenues à 43% par des investisseurs étrangers.
Le dirigeant de première banque allemande voit-il toujours la France comme un pays attractif pour les investisseurs ? «General Electric semble en tout cas le croire», a-t-il répondu par une petite boutade, déclenchant quelques rires dans l’assistance à Francfort. L’industriel américain vient en effet de prendre le contrôle du français Alstom face au rival allemand Siemens.
Soutenir la diversité du système bancaire en Europe
Le co-président de Deutsche Bank a par ailleurs plaidé pour le maintien d’une diversité du paysage bancaire en Europe, ce qui est une condition pour soutenir la croissance. Les banques universelles, en premier lieu l’allemande Deutsche Bank ou, en France, BNP Paribas et la Société Générale, ont à ce titre autant leur place dans le secteur bancaire que les banques régionales, ou spécialisées dans une ligne de métier.
Mais alors que «les Etats-Unis ont reconnu la valeur de cette diversité et soutiennent le développement d’un secteur bancaire bien régulé, ou plusieurs modèles d’activité peuvent coexister», en Europe, les banques avec un accent régional sont davantage favorisées par rapport aux banques globales universelles et banques parallèles (shadow banking)», a-t-il déclaré lors de son intervention liminaire. «Si l’Europe ne construit pas son propre écosystème bancaire diversifié, les conséquences pourraient être sévères», a-t-il prévenu. Il a cité la difficulté pour assurer une distribution de crédit à plus large échelle, et la concentration des risques sur moins d’acteurs.