Qu’il est doux de ne pas être coté lorsque les marchés sont secoués. Cette morale a vraisemblablement inspiré Rémy Weber, président du directoire de la Banque postale, qui a présenté les résultats annuels du groupe jeudi 25 février. Le sourire aux lèvres, M. Weber s’est permis une litote : « Par les temps qui courent, de volatilité des marchés, être une banque publique non cotée, c’est… pas mal. C’est pas mal ! » Puis, après un silence : « je me garderai bien de mentionner la valorisation boursière de mes confrères. »
S’il s’est bien gardé de la mentionner, c’est que la valorisation des banques françaises cotées sur le CAC 40 est très chahutée depuis le début d’année. Ce sont en fait les banques européennes dans leur ensemble qui ont été attaquées sur les marchés financiers, très volatiles. Dans un contexte de nervosité lié au ralentissement de la croissance mondiale, les investisseurs se sont inquiétés de l’exposition des banques au pétrole, de leur portefeuille de créances douteuses et de leur capacité à dégager de la rentabilité.

« Surprudence »

La Banque postale, elle, est peu exposée à ces turbulences internationales. Elle réalise 90 % de son activité sur la banque de détail française pour les particuliers. Certes, l’environnement n’y est pas favorable non plus, avec le prolongement de la baisse des taux et l’augmentation des contraintes réglementaires, qui rognent les marges. A ce sujet, M. Weber a jugé qu’« en ce moment, le balancier [allait] un peu trop loin dans le sens de la sur-prudence. Les banques sont faites pour financer l’économie, pas pour accumuler des fonds propres et des liquidités dont elles ne savent que faire. (…) Le but n’est pas de placer [ces dernières] à taux négatif. »
Aussi le dirigeant s’est-il félicité de présenter, malgré ces contraintes, « les meilleurs résultats de la Banque postale depuis sa création ». Le produit net bancaire, équivalent du chiffre d’affaires, a progressé de 1,3 %, à 5,7 milliards d’euros. Le résultat net a augmenté de 4,4 %, à 707 millions d’euros.

Un « côté rassurant » en période de crise

Mais M. Weber n’en est pas resté là. La Banque postale est moins présente que ses concurrentes sur des marchés prometteurs, comme la clientèle professionnelle et la banque privée ? Qu’à cela ne tienne, elle peut en tirer plus de croissance. « Nous avons un champ de progrès que d’autres n’ont plus, dans un environnement surbancarisé, a-t-il estimé. C’est une perspective très encourageante d’aller chercher de la croissance [là où] nous sommes des outsiders, avec des parts de marché très basses. Nous sommes les seuls à n’avoir saturé aucun marché. »

Sur le secteur des entreprises, l’établissement a presque multiplié par deux sa production de crédits en 2015, à 5,3 milliards d’euros. Quant à sa filiale patrimoniale, elle compte désormais 587 000 clients, en hausse de 3,3 % en 2015, grâce à « l’installation d’espaces banque privée dans les bureaux de poste qui le méritent », a précisé le dirigeant. Pour convaincre les clients aisés, la filiale bancaire du groupe La Poste compte sur son « côté rassurant » en période de crise, rappelant « l’afflux massif de nouveaux clients, essentiellement patrimoniaux » en 2008, après la faillite de Lehman Brothers.

Morale de l’histoire : « on retourne toujours vers la sphère publique quand on est dans le doute », a conclu le magnanime M. Weber. Pour la Banque postale, assure-t-il, le verre ne sera pas à moitié vide en 2016, mais bien à moitié plein.