Le projet chinois initié en octobre 2014 afin de lancer la Banque asiatique d’investissements dans les infrastructures (AIIB – Asian Infrastructure Investment Bank) prend chaque jour un peu plus d’épaisseur, notamment avec la participation des Etats Européens. Après le Royaume-Uni, la France, l’Italie, et l’Allemagne, la Suisse et aussi l’Australie et le Brésil ont déclaré leur intention de participer à cette nouvelle banque de développement. Le 28 mars, la Russie a également exprimé son souhait de s’inscrire au rang des membres fondateurs de l’AIIB,
La Russie candidate à l’AIIB
Depuis le Forum international de Boao (Chine), le vice-Premier ministre russe, Igor Chouvalov a fait savoir que la Russie souhaitait rejoindre les pays fondateurs de cette institution qui devrait être basée à Pékin. « J’aimerais vous informer que le président Vladimir Poutine a décidé que la Russie va participer au capital de la banque asiatique d’investissement dans les infrastructures (AIIB) », a indiqué Igor Chouvalov.
Choix de la raison
Ce positionnement ne surprend guère car sur le front diplomatique, la Russie multiplie les appels du pied à Pékin. Dans le contexte d’embargo économique imposé par l’Europe occidentale et les Etats-Unis en raison du conflit en Ukraine, la Chine pourrait constituer une solution économique pour Moscou. Accepter la Russie dans le cercle des membres fondateurs de l’AIIB, alors que les Etats occidentaux l’ostracisent, constituerait pour Pékin un fin pas diplomatique vers les riches ressources russes en hydrocarbures. En exprimant la volonté de la Russie de poser sa pierre à l’édifice de l’AIIB, Vladimir Poutine fait d’une pierre deux coups ; il s’octroie les faveurs du Président Xi Jinping et défie un peu plus les Etats-Unis.
Washington tousse
Washington critique en effet ouvertement l’AIIB. La nouvelle institution est une affirmation de la puissance économique de la Chine, de sa montée d’influence en Asie, et de sa capacité à fédérer les pouvoirs à ses côtés. Le nouvel établissement financier est de nature à concurrencer à la fois la Banque mondiale sous influence américaine et également la Banque asiatique de développement (BAD) dominée par le Japon et les Etats-Unis. Dans ce jeu de pouvoirs des institutions internationales, Washington n’est d’ailleurs pas parvenu cristalliser l’intérêt pour son alliance anti-AIIB, et paraît de plus en plus isolé dans sa contestation…
Porte ouverte sur l’avenir
Qu’une trentaine d’Etats, bonne fées, se penchent sur le berceau de l’AIIB n’est pas un hasard… L’enjeu du jeu d’influences à l’AIIB est bien sûr économique. Cette nouvelle banque sera dotée d’un capital initial de 50 milliards de dollars et jouera sur le terrain de la BAD. La nouvelle structure permettra à la Chine de positionner ses équipements en surcapacités sur de grands contrats asiatiques d’infrastructures. L’AIIB est aussi une porte ouverte sur l’avenir des économies chinoises et asiatiques, une ouverture où les pays fondateurs s’engouffrent en imaginant de juteux contrats pour leurs compétences pointues d’équipement. Toujours empêtrés dans une conjoncture économique morose, les Européens n’ont guère d’autre choix, et ce au risque de déplaire au puissant grand frère américain.